« C’est une idée pertinente qui permettrait de relier Paris au 93 ». Dans une interview au JDD daté du 2 Décembre, Anne Hidalgo parle ainsi de l’éventualité d’un tramway sur le tronçon 19e – 20e – 12e de la Petite ceinture.
S’appuyant sur le schéma de l’Agence parisienne d’urbanisme, la candidate propose une Petite ceinture dont certains tronçons seraient aménagés en espaces de promenade, de loisirs ou naturels et d’autres dédiés à la reprise d’une circulation ferrée.
C’est d’abord le tempo des annonces d’Anne Hidalgo qui surprend. Au printemps dernier, le Conseil de Paris avait décidé, sur proposition des élus écologistes, du lancement d’un grand débat public avec les parisiens sur l’avenir de la Petite ceinture. Mais en Septembre, brutalement, les élus PS / PC avaient fait marche arrière et quasi annulé le processus : il n’en reste qu’une consultation qui doit être bouclée dans 3 mois alors que rien n’a débuté.
On comprend mieux maintenant cette volte-face : Anne Hidalgo ne souhaitait pas réfléchir et débattre avec les parisiens ; elle voulait reprendre l’avenir de la Petite ceinture comme thème de sa campagne électorale déjà lancée. L’élaboration participative tant claironnée est jetée à la poubelle et il ne reste qu’une étude d’agence pour légitimer la communication de la candidate.
Pourtant, le schéma d’aménagement proposé par l’Apur est très discutable.
Le tronçonnage de la Petite ceinture portera atteinte à sa biodiversité, et au-delà aux continuités écologiques sur le territoire de la Ville et de la région. A l’heure où tout le monde se félicite du retour des renards dans les Buttes-Chaumont, symbole d’un accroissement de la biodiversité, la défense du tronçonnage de la petite ceinture sonne comme un désintérêt pour l’environnement.
L’idée de développer le tramway dans Paris est essentielle. Les projets utiles ne manquent pas : tramway Nord-Sud, tramway des gares, bords de Seine…Le tramway a vocation à s’insérer dans la ville, dans les espaces de circulation existants et à les modifier par une nouvelle répartition de la voirie et de l’aménagement urbain. Son rôle n’est pas de porter atteinte à des espaces naturels ayant acquis une valeur environnementale majeure comme la Petite ceinture. Proposer comme Anne Hidalgo un tramway sur le tronçon Nord-Est de la Petite ceinture est à cet égard une lourde erreur.
Les habitants du nord-est parisien, du 19e et du 20e, devraient donc assister à la création d’espaces de promenade, de nouveaux jardins partagés, de lieux de repos, d’activités de loisirs ou sportives…dans le 15e, le 14e ou le 13e. Cette conception profondément inégalitaire de la Ville, où les uns profitent d’aménagements de qualité pendant que les autres sont laissés pour compte est inacceptable. De nombreux habitants de nos quartiers vivent en bordure de la Petite ceinture et ce n’est vraiment pas une « idée pertinente » de leur faire subir la reprise d’un trafic ferroviaire.
Et d’ailleurs, qui financerait un tel projet ? La mise en service du tramway sur les maréchaux vide de tout intérêt la création d’une ligne sur la Petite ceinture. Les coûts d’aménagement des gares et des interconnexions avec les lignes de métro rendent à eux seuls le projet bien trop coûteux. Gardons les financements disponibles – de plus en plus rares- pour des projets où l’intérêt général prévaut sur les choix de RFF et de quelques lobbys particuliers.
Anne Hidalgo, dans sa volonté d’occuper le terrain et d’asseoir sa légitimité de candidate, procède avec une méthode précipitée et singulièrement peu participative. A travers l’avenir de la Petite ceinture, on voit bien qu’elle n’a pas pris la mesure de la demande de respect et d’égalité des habitants du nord-est de la capitale.
Le tronçonnage de la Petite ceinture qu’elle propose sonne comme un aveu d’incompréhension face à des enjeux qui sont ceux d’une politique cohérente en termes de transport, d’environnement et d’égalité entre les parisiens.
Bernard JOMIER
Maire-adjoint (EELV) Paris 19e