Mathurin Moreau : préservons et investissons dans les jardins d’enfants

Intervention d’Aurélie Solans lors du Conseil d’arrondissement du 12 septembre 2017 sur la transformation du jardin d’enfants Mathurin Moreau en un multi-accueil de 36 places.

 

Monsieur le maire, mes chers collègues,

En janvier dernier, nous adoptions en Conseil de paris un plan pour rénover et moderniser les 22 jardins d’enfants dit Paris habitats.

Nous partagions tous le constat d’une nécessité à investir dans ces établissements municipaux. Un peu en marge des évolutions des dispositifs, des réseaux, ce plan était nécessaire. Tarification revue et alignée, statut des personnels mis en conformité, rénovations batimentaires ; ces axes du plan, montrent bien la volonté de la ville de les préserver.

Nos 22 jardins d’enfants de Paris Habitat sont parmi les plus anciennes structures dédiées à la petite enfance dans notre ville.

Je me permets un peu d’histoire.

Créés à partir du début des années 20, ils ont été une véritable innovation sociale et pédagogique. A une époque où l’école maternelle était encore à ses balbutiements, sur une tranche d’âge où l’école n’est pas obligatoire, leur création visait très clairement d’améliorer la réussite scolaire des enfants issus des milieux défavorisés. Dans le même temps, et c’est certainement un facteur déterminant de leur intérêt et de leur pérennité, ces jardins d’enfants sont fréquentés depuis longtemps par les enfants de familles de catégorie socio-professionnelles variées, qu’elles soient locataires chez le bailleur social ou non.

Ils sont issus d’un mouvement pédagogique né en Europe au 19e siècle, précurseur en matière de pédagogies actives et ont pour modèle les fameux « Kindergarden » qui en Allemagne notamment jouent un rôle de premier plan dans l’éducation des jeunes enfants.

Dans une époque où se posent beaucoup de questions et de défis sur l’éducation des jeunes enfants, en particulier dans la lutte contre l’échec scolaire et la reproduction des inégalités, la singularité des projets de ces jardins d’enfants de la ville mérite très clairement d’être préserver et dynamiser.

De ce point de vue, l’étude qui sera lancée avec l’observatoire du changement de Science Po Paris autour de leur apport éducatif et de leur  fonctionnement sur 3 années permettra d’en savoir plus sur l’impact de ces structures d’accueil sur les trajectoires en particulier scolaire des enfants.

Alors, chers collègues, vous comprendrez bien que, attachés à ces lieux, nous n’adhérions pas à la fermeture d’un entre eux. Nous ne sommes pas les seuls, à Paris, puisque personnels et parents ont eu l’occasion déjà au printemps dernier de se rassembler devant l’Hôtel de Ville contre de telles décisions.

Certes, le jardin Mathurin Moreau est le seul à Paris, sur 22. Certes, le 19e est bien doté en jardins d’enfants par rapport à d’autres. Certes, il est en sous-fréquentation.

Mais tout de même :

  • Nous sommes dans un quartier politique de la ville, au cœur des Chaufourniers. Une telle structure rend des services si précieux, dans l’accueil d’enfants porteurs de handicap, dans la préscolarisation des enfants de 2-3 ans, dans l’accompagnement des familles primo arrivantes, tout cela dans des conditions très adaptées, très favorables. Pourquoi nous défaire de cet outil si précieux pour répondre à ces besoins ?
  • La sous-fréquentation ne peut être un argument de fermeture, sans avoir travaillé à leur rendre visible, sans l’avoir modernisé. Et en bordure du 10e arrondissement, a-t-on vraiment travaillé à toucher les familles de ce quartier situé de l’autre côté de la place Colonel Fabien ?

Bien sur nous devons tenir  nos objectifs en matière de places en crèches.

Mais n’opposons pas les besoins. Tout ce secteur est un formidable levier de prévention, d’égalité, de bienveillance. Dans nos quartiers populaires,  c’est tout un maillage que nous devons consolider.

Notre groupe s’abstiendra donc sur cette délibération et d’ici au Conseil de Paris, j’espère que nous pourrons poursuivre nos échanges autour de l’évolution de ce lieu.

Nous ne sommes pas fermés à des évolutions du projet, par exemple, en faveur d’un lieu innovant, accueillant une tranche d’âge plus large, avec l’intégration d’enfants plus petits. Ce type d’établissement qui existe ailleurs dans le monde, serait inédit à Paris et en France.